Lorsque l’on parle de transition vers le management, un aspect souvent négligé est la dimension émotionnelle liée à cette évolution. Un expert, reconnu pour sa maîtrise technique ou son expertise dans un domaine particulier, peut se sentir déstabilisé en accédant à un poste de manager. Ce passage nécessite non seulement de nouvelles compétences, mais aussi, et surtout, un véritable deuil : celui de l’expertise, qui constituait jusque-là l’essence de son identité professionnelle. Comment alors faire ce deuil et réussir à pleinement embrasser le rôle de manager ?
Pour un expert, l’expertise n’est pas seulement une question de compétences techniques, mais une source de reconnaissance, de fierté, et souvent, de légitimité au sein de son équipe ou de son organisation. L’expert se distingue par sa capacité à résoudre des problèmes complexes, à maîtriser des outils spécifiques, ou à apporter une vision pointue sur des sujets critiques.
Cette expertise est une base solide sur laquelle l’expert a construit sa carrière. Mais lorsqu’il devient manager, son succès ne repose plus uniquement sur ses connaissances techniques. Son rôle se transforme et les attentes à son égard changent.
Le premier défi pour l’expert qui devient manager est souvent lié à la perte de contrôle. En tant que spécialiste, il est habitué à avoir un contrôle direct sur les tâches et les résultats. Or, le management exige de déléguer, de faire confiance aux autres, et d’accepter de ne plus être au cœur de l’action opérationnelle. Cela peut générer une peur de la perte de légitimité et une angoisse face à l’incertitude.
Faire le deuil de l’expertise signifie accepter que d’autres prendront le relais sur les tâches techniques. Cela ne veut pas dire que l’expert doit renoncer à son savoir, mais qu’il doit apprendre à ne plus être celui qui « fait ». Il doit plutôt devenir celui qui « guide » et « développe » ses collaborateurs.
Un autre aspect crucial du deuil de l’expertise est la redéfinition du rôle. Le manager n’est plus évalué uniquement sur sa capacité à maîtriser des compétences techniques, mais sur sa capacité à développer son équipe, à prendre des décisions stratégiques, à gérer les relations interpersonnelles, et à atteindre des objectifs à travers les autres. Cette transformation peut être perçue comme une perte de statut, surtout si l’expert ne trouve pas immédiatement satisfaction dans ses nouvelles responsabilités.
Cependant, ce nouveau rôle peut aussi devenir une source de motivation et de satisfaction. Le manager devient alors un Senseï, un guide, capable d’accompagner ses collaborateurs dans leur propre développement, à l’image de l’enseignant dans les arts martiaux comme l’aïkido. Il s’agit non plus de briller par ses propres compétences, mais de permettre aux autres de progresser, tout en intégrant une vision globale et stratégique de l’organisation.
Dans l’aïkido, l’objectif n’est pas d’affronter l’adversaire avec force, mais de comprendre son énergie et de l’accompagner pour trouver une issue harmonieuse. Le manager, à l’instar du pratiquant d’aïkido, doit apprendre à canaliser l’énergie de son équipe, à la guider sans s’imposer. Cette approche reflète la transition nécessaire entre l’expertise technique et le management : ce n’est plus une question de puissance individuelle, mais d’harmonie collective.
Faire le deuil de l’expertise, c’est accepter de ne plus être l’expert de référence, mais de devenir celui qui sait créer un environnement propice à l’émergence d’autres talents. Le manager expert doit donc pratiquer une forme de lâcher-prise, tout en conservant la capacité à apporter sa valeur ajoutée au bon moment, comme le Senseï qui intervient avec justesse dans le processus d’apprentissage.
Pour accompagner cette transition, plusieurs stratégies peuvent être utiles :
Article rédigé par Thierry Huss-Braun, fondateur et dirigeant de GO4HUMAN, Senseï en leadership, coaching et aïkido
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